Solitude
Cela fait plusieurs jours que j'essaie de poster. Du gai, du joli, pour changer. Mais chaque fois, je me heurte à la douleur de ma fille.
Au début de l'année scolaire, elle ne voulait pas se mêler aux autres. Seule, elle était très contente.
Bon.
Puis elle s'est faite des copines dans la classe. Elle était contente.
Puis, elle ne sait pas trop pourquoi ni comment, les copines se sont disputées puis séparées. Laissant Nana au milieu, désamparée.
Elle m'a raconté ses récréations. Elle erre d'un groupe à l'autre, demandant à jouer... Chaque fois la réponse est là même. Non. Alors elle échoue tristement sur un banc, à côté d'une autre exclue. Elles ne se parlent pas. Mais elles ne sont pas tout à fait seules. Dixit Nana.
Lorsqu'elle m'a raconté cela, il a fallu que je me tourne pour cacher mes larmes. C'est insupportable. De vivre ça, à 8 ans. De l'entendre, pour une maman. De ne pouvoir rien faire, rien d'immédiat, pour soulager la peine de son enfant.
A cela s'ajoute les méchancetés d'un petit garçon, depuis le début de l'année. Physiques, verbales. Elle, si fragile, si faible, si esseulée, est une proie facile... Une tête de turc, un bouc émissaire.
J'ai discuté avec le prof. Tout va bien, elle travaille bien.
Manifestement, il refuse de se mêler des histoires des enfants. D'accord, la plupart du temps, mais là, ce n'est pas de l'ordre des histoires d'enfants.
Il s'agit d'une fillette irrémédiablement blessée, souffrant de troubles de l'attachement, ne sachant se comporter avec les autres, écrasée de culpabilité de surcroît. Alors faute de pouvoir lui trouver des copines de force, au moins lui éviter des coups supplémentaires?
Il y a eu un léger mieux, la semaine dernière. Elle avait un amoureux dans la classe. Et toute la bande de copains qui allait avec. Elle avait l'air si heureuse... Si soulagée... Ca a duré 3 jours. Il est amoureux d'une autre.
Et ma fille est seule, à nouveau, et à nouveau en but aux méchancetés de son camarade.
Hier, elle me racontait tout cela. Et que son prof n'est jamais disponible pour l'écouter - et de toute façon, la plupart du temps elle n'ose pas.
Je songeais qu'elle pourrait écrire une lettre à son enseignant... Une lettre, on la lit, forcément. Ca pourrait lui ouvrir les yeux. Mais suggérer ça, à une fillette de 8 ans... Elle n'aurait sans doute pas voulu, ou l'aurait fait pour me faire plaisir.
Alors je l'écoutais, simplement. Et soudain, l'idée est venue d'elle. "Je vais écrire à mon maître".
Elle l'a fait... Nous verrons la réaction demain...
Au delà de mon chagrin pour elle, je reste bluffée par l'écoute active chère à Gordon. On ne peut trouver des solutions à la place de l'enfant. Mais lorsqu'on se contente de l'écouter, il peut aller jusqu'au bout de sa réflexion, prendre en charge ses problèmes et envisager une solution.
Evidemment, tout cela reste bien pauvre en regard du drame vécu au quotidien par ma fille. Si dérisoire face au désespoir d'une petite fille de 8 ans...